Kentron

Kentron – dont le nom peut renvoyer aussi bien à l’aiguillon du cavalier que, au sens figuré, à la stimulation – est une revue pluridisciplinaire qui s’appuie sur une expérience acquise pendant près de quarante années au cours desquelles elle a certes connu des évolutions, mais dont l’objectif premier est toujours demeuré le même : faire dialoguer des disciplines différentes et enrichir l’étude de l’Antiquité en croisant les modes d’approche et en multipliant les perspectives. Aujourd’hui, la revue peut s’enorgueillir d’une audience de plus en plus large, notamment grâce à la qualité des articles qu’elle publie et à sa diffusion en open access.

Kentron: une histoire entre mutations et permanences

Fondée en 1985 par François Hinard, alors professeur d’histoire romaine et d’archéologie à l’Université de Caen, avec la volonté qu’elle devienne « un outil utile de correspondance scientifique » (« Liminaire », Kentron, 1, p. 2), la revue, éditée d’abord de manière assez artisanale, comportait à ses débuts deux à cinq petits fascicules par an, et les articles, volontairement courts, traitaient principalement d’histoire, de littérature et de philologie anciennes, sans rien s’interdire du moment que cela permettait de faire avancer les échanges au sein des études anciennes : le premier bulletin traitait ainsi aussi bien de la Rome républicaine, que d’Aristote en passant par l’étude des modèles amoureux proposés par les romans grecs ou encore celle de la civilisation indo-européenne. S’appuyant sur un comité de rédaction composé, outre de son directeur de publication, de deux à trois autres membres, tous rattachés à l’Université de Caen, Kentron est très rapidement « apparue comme un lieu de rencontre et de ralliement de chercheurs de disciplines différentes réunis par un objectif unique : la connaissance du Monde Antique » (éditorial du vol. 10, 1994, p. 3). Cette première époque de la revue a ainsi vu les contributions de grands savants comme Geneviève Husson, Claude Orrieux, Dominique Briquel, Jean-Louis Perpillou, Yann Le Bohec, Alain Moreau, François Jouan, entre autres.

En 1989, François Hinard quitte l’Université de Caen pour la Sorbonne, mais reste encore à la direction de la revue jusqu’en 1994, date à laquelle il est remplacé dans cette fonction par Bernard Deforge, professeur de langue et de littérature grecques, déjà actif dans le comité de rédaction depuis une dizaine d’années, et Jacquy Chemouni, professeur de psychologie clinique et de psychopathologie. Tous deux à l’Université de Caen, ils collaboraient au sein du Groupe de recherche “Mythe, Histoire et Psychanalyse”, dont une partie des travaux avait déjà donné lieu à des publications régulières dans Kentron, en particulier depuis 1992 dans le cadre d’une réflexion consacrée à “La Mère et la Maternité dans le monde grec ancien et dans la psychè”. Cette nouvelle direction entérine donc un tournant dans l’histoire de Kentron : une orientation plus marquée vers le symbolisme, la matière mythique et ses interprétations, notamment – mais pas exclusivement – psychanalytiques. Cette année-là, l’éditorial de la revue proclamait ainsi : « Notre ambition est d’offrir une revue qui transcende les particularismes dans lesquels nos disciplines, en France plus que chez nos voisins anglo-saxons, se sont enfermées trop complaisamment. Il nous semble urgent et impératif que les études du Monde Antique s’ouvrent à l’apport des interrogations, des méthodes et des acquis des sciences humaines, principalement la psychologie des profondeurs » (éditorial du vol. 10, 1994, p. 3). Afin de rendre plus visible cette nouvelle perspective interdisciplinaire, la revue se dote alors d’un sous-titre éloquent : Revue du monde antique et de psychologie historique. Sur le plan éditorial, cette période connaît également une évolution notable : la publication de la revue, à partir de 2000, par les Presses Universitaires de Caen et dès 2002 le passage à un numéro annuel, en lieu et place des deux numéros semestriels qui avaient déjà remplacé, dès le volume 10, les petits fascicules précédents. La revue est en outre dotée d’un Comité scientifique international.

En 2008, Kentron tourne une nouvelle page de son histoire, avec l’arrivée à sa tête de Pierre Sineux, professeur d’histoire grecque à l’Université de Caen. Ce dernier lui donne en effet une encore plus grande visibilité et reconnaissance scientifiques, d’une part en ouvrant la revue à des contributions en langue étrangère (anglais, allemand, espagnol, italien, portugais) et, surtout, en renouvelant complètement son Comité scientifique, désormais extra-européen, et en remplaçant le Comité de rédaction par un Comité de lecture. Chaque volume est dorénavant constitué, outre de varia et de comptes rendus, d’un dossier thématique : Histoire et actualité des sciences de l’Antiquité (2009) ; L’imaginaire utopique dans le monde grec (2010) ; Le rêve et les rêveurs dans l’Antiquité (2011) ; Transferts, emprunts, réappropriations (2012) ; L’Hortus sanitatis (2013) ; L’emprunt, une pratique d’écriture (2014) ; Les Socratica de Xénophon (2015) ; Approches historiennes des images (I : 2016 ; II : 2017). C’est encore à Pierre Sineux que Kentron doit d’être diffusée sur la plate-forme Revues.org à partir de 2016. Comme l’indique l’Avant-Propos de la livraison de 2009 (volume 25), il n’est néanmoins pas question de renier ce qui faisait, depuis le début, l’originalité de la revue : « la volonté de faire dialoguer des disciplines différentes et d’enrichir l’étude de l’Antiquité en croisant les modes d’approche et en multipliant les perspectives ».

Bien que le décès soudain de Pierre Sineux, en 2016, ait conduit à un changement de direction pour la revue, c’est toujours la même formule et la même ligne qui dictent les choix éditoriaux de la nouvelle équipe.

Kentron aujourd’hui : une revue pluridisciplinaire du monde antique reconnue

Depuis 2017, Kentron est dirigé par Typhaine Haziza et Caroline Blonce, toutes deux maîtresses de conférences en histoire ancienne à l’Université de Caen-Normandie – l’une en histoire du monde grec et de l’Égypte antique, l’autre en histoire romaine –, animées du même souci de favoriser le croisement des approches de l’Antiquité. C’est ainsi que Kentron, revue pluridisciplinaire du monde antique, ouvre toujours ses pages aux littéraires, historiens, philosophes, ethnologues, anthropologues, linguistes, philologues, archéologues… et s’autorise même à publier des articles qui ne relèvent pas de l’étude de l’Antiquité quand ceux-ci peuvent en éclairer la connaissance, dans une volonté de favoriser la diachronie et la transdisciplinarité. La revue publie toujours un numéro chaque année, constitué d’un dossier thématique, de varia et de comptes rendus d’ouvrages. Ces dernières années, l’équipe de direction a particulièrement travaillé au renforcement de la qualité de la revue et à son rayonnement, d’une part en demandant au coordinateur du dossier thématique une plus grande implication (en particulier en ouvrant le dossier par une introduction le présentant) et d’autre part en préparant la mise en ligne sur Persée des numéros antérieurs à 2000 qui, jusqu’alors, n’étaient pas disponibles en open access. Ces efforts sont récompensés par un nombre de lecteurs en forte progression et par l’envoi de plus en plus abondant de soumissions spontanées d’articles ou de dossiers thématiques.

Ces derniers s’appuient généralement sur des communications présentées lors de manifestations scientifiques internationales ou dans le cadre de programmes de recherche d’envergure. C’est le cas, par exemple, du dossier thématique du volume 35 (2019), Alimentation et identité(s), dont les articles sont issus de communications prononcées lors d’un colloque international à Caen (organisé les 11-12-13 octobre 2018 par Typhaine Haziza, Alban Gautier et Luciana Romeri) ; de celui du volume 36 (2021), Jeu, normes et transgressions, coordonné par Véronique Dasen et Typhaine Haziza, développant des réflexions enrichies par plusieurs années de recherches intenses, sous l’impulsion de l’équipe de l’ERC Advanced, « Locus Ludi. The Cultural Fabric of Play and Games in Classical Antiquity », piloté par Véronique Dasen ; du dossier du volume 37 (2022), Violences de masse et violences extrêmes en contexte de guerre dans l’Antiquité, porté par l’équipe de l’ANR Parabainô et tout particulièrement par son coordinateur Jean-Baptiste Bonnard qui y a rassemblé des communications issues de la Table ronde Parabainô qui a eu lieu à Caen en mars 2022 ou encore du dossier de la toute dernière livraison (volume 38, 2023), Pax. Pour une histoire de la paix romaine, qui reprend des interventions issues d’un colloque, organisé par Caroline Blonce et Thomas Hippler, qui s’est tenu à Caen les 22 et 23 mai 2018, dans le cadre du projet de recherche PEACE – La paix : perspectives historiques, conceptuelles et normatives (2018-2019), financé par la région Normandie (RIN Recherche).

Les deux directrices jouent un rôle important dans l’activité éditoriale de la revue, aidées en cela par des Secrétaires de rédaction (Christine Dumas-Reungoat et Olivier Desbordes jusqu’en 2020 ; Antoine Foucher depuis 2022) et un Comité de lecture, composé de six autres membres. Reconnue comme une revue internationale avec comité de lecture, Kentron accueille des contributions en langue étrangère (anglais, allemand, espagnol, italien). Le dossier thématique fait l’objet d’un appel à contribution dans le numéro précédant celui de la publication. Chaque article est présenté en fin d’ouvrage par un résumé, dans la langue de l’article et en anglais, et est référencé par une liste bilingue de mots-clés (10 au maximum). Chaque article fait l’objet de deux expertises (dont au moins une extérieure au comité de lecture de la revue), donnant lieu chacune à un rapport d’évaluation. Des commentaires en marge du texte peuvent venir compléter le rapport sur des points précis. Les experts indiquent si l’article est publiable en l’état ou avec des modifications mineures, s’il est publiable sous réserve de modifications importantes ou s’il n’est pas publiable. Chaque article est également relu et éventuellement corrigé par l’une des deux directrices et/ou le secrétaire de rédaction, pour avis final, tout particulièrement en cas de désaccord entre les experts. Si les corrections demandées aux auteurs ne sont pas faites, ou pas suffisamment prises en compte, la direction de la revue s’accorde le droit de refuser la publication. Les auteurs sont tenus enfin de respecter normes éditoriales et feuille de style qui leur sont communiquées (le non-respect pouvant entraîner le rejet des contributions). Les recommandations aux auteurs sont celles des PUC, consultables sur le site des PUC, à la rubrique “Informations aux auteurs”. Les articles doivent être présentés dans un niveau de langue suffisant pour être retenus, la revue étant très attachée au maintien d’un style de qualité.

Typhaine Haziza pour l’équipe éditoriale de Kentron